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Programme des Proms | 30 août 2022

D’une époque plus ancienne à la scène d’aujourd’hui

Le journaliste Ian Harrison parle aux membres du groupe PSB à propos de transformer le concept de This New Noise en performance sur la scène du Royal Albert Hall

En 1922, le directeur général fondateur de la BBC, John Reith, a déclaré que le mandat de la nouvelle société de radiodiffusion était de “Informer-Éduquer-Divertir”. 91 ans plus tard, l’ensemble rock électronique féru d’histoire, Public Service Broadcasting, a utilisé la formule de Reith comme titre de son premier album. “Quand tu fais cela”, raconte le membre principal et compositeur de PSB, J. Willgoose, Esq., “tu invites directement certains parallèles, n’est-ce pas ?”

Il est apte, alors, que ce soir Public Service Broadcasting marque le centenaire de la BBC avec leur nouvelle suite de chansons, This New Noise, qu’ils interprètent avec le BBC Symphony Orchestra dirigé par Jules Buckley.

Peu d’autres groupes auraient été à la hauteur du challenge à cet égard. Formés dans le Sud de Londres en 2009, PSB ont respecté leur propre credo fondateur – sur une série de sorties qui ont incorporé des samples audio vintages dans de frappants portraits musicaux de, diversement, la seconde guerre mondiale (The War Room, 2012), la montée et le déclin de l’industrie minière britannique (Every Valley, 2017) et la ville de Berlin et la métropole moderne (Bright Magic, 2021). Entretemps, une nouvelle version de The Race For Space de 2015, évocation émouvante de la rivalité des supers puissances en orbite pendant la guerre froide, a été jouée mémorablement aux Proms de 2019 avec le Multi-Story Orchestra de Peckham.

Mais comment résumer 100 ans de la société de diffusion nationale dans ses aspects ? Comme d’habitude avec PSB, l’approche est indirecte. “Elle couvre les années 1922 à possiblement 1937”, explique Willgoose, qui a commencé à écrire la musique plus tôt cette année. “En termes des bonds technologiques et quasi spirituels qui ont été faits, et le genre d’expansion évangélique de la BBC, c’est quasiment entièrement pré-guerre et pré-télévision. Essayer de faire rentrer tout ce que la Beeb a fait en 100 ans, on se serait retrouvés à faire une sorte de montage, avec, je ne sais pas, le générique de Jackanory ou peu importe. Cela aurait été en danger de juste devenir nostalgique, et nous ne sommes pas intéressés par cela”.

Mettre en lumière des vies et des idées qui semblent très éloignées de notre propre époque a impliqué de l’immersion et de l’étude. “J’ai lu des anciens numéros de Radio Time de 1927, de la première à la dernière page”, raconte Willgoose avec entrain : d’autres œuvres de référence incluaient Broadcasting (1933) par la pionnière de la production Hilda Matheson, The Story of Broadcasting (1924) par Arthur Burrows – le speaker qui a lu le tout premier bulletin d’informations de la BBC le 14 novembre 1922 – et les mémoires du génie fondateur Lord Reith, qui envisageait le service comme “le guide, philosophe et ami du citoyen”.

“L’idée”, selon Willgoose, “est de revenir là où elle a commencé, et de simplement demander, Pourquoi était-elle organisée de cette manière ? Qui était derrière ? Que pensaient-ils avoir avec cette nouvelle technologie de la radio ? Quel rôle pensaient-ils qu’elle remplissait ? Que pensaient-ils qu’elle ne devrait pas faire ? Cela parle de la magie de cette boîte qui est simplement apparue dans le salon des gens et tout à coup des voix en sortaient à tout moment de la journée – c’est assez renversant”.

En réunissant ses samples bruts, il a dû naviguer entre ce qui existe effectivement et ce dont il est possible d’obtenir l’autorisation, même s’il a reçu, dit-il, une aide inestimable de Simon Rooks de BBC Archives. Cela étant une Prom, il fallait également penser à un orchestre. De manière pratique, le bassiste et joueur de cuivre JFAbraham sert d’orchestrateur et arrangeur, partant des démos peaufinées de Willgoose :

“une autre préparation a impliqué les deux partageant des playlists en ligne, écoutant Ravel et Debussy, et allant à des concerts dont le Concerto pour violon de Korngold, la Symphonie n°6 de Tchaïkovski et la Music for 18 Musicians de Steve Reich. JF comble avec obligeance l’écart entre mon ignorance et le talent et la maîtrise d’un orchestre”, explique Willgoose. “Lire de la notation n’est souvent pas la manière dont les musiciens pop apprenent des chansons”, déclare JF avec diplomatie.

“Quand on a fait la Prom The Race For Space, les chansons pré-existaient”, dit JF, qui a étudié la trompette orchestrale pendant cinq ans et a également arrangé pour Bastille et Jessie Ware. “Mais ce n’est que des morceaux normaux qui ont été conçus pour un orchestre et le groupe. J joue de la guitare, Wrigglesworth de la batterie et cette fois je ne joue que du piano. C’est une version très réduite de ce qu’on fait habituellement en tant que groupe, parce qu’on a aussi cette énorme bête d’orchestre de 80 personnes”.

“Je suis une sorte de romantique refoulé”, explique Willgoose de l’écriture pour des cordes, des bois et des cuivres. “Cela ressort dans notre musique, même si cela ne ressort définitivement pas dans la vie quotidienne. Cette œuvre a nécessité d’avoir des moments d’envolée et les gros thèmes qui j’espère vont provoquer les gens. Cela fait partie de l’intérêt; qu’ils soient fiers de cette chose que leur pays a créée”.

“Le sentiment physique d’être proche d’un orchestre de cette taille et ce niveau de talent artistique, et l’étendue dynamique qu’ils peuvent produire – ça change l’air qui t’entoure”, explique JF. “Quand ça fonctionne au mieux, c’est juste un énorme organisme avec un but commun, de réaliser une œuvre plus grande”.

Alors c’est le cas avec This New Noise, tandis que des moments clés du début de l’histoire de la BBC sont évoqués dans huit tableaux sonores qui fusionnent l’antique et le futuriste. Cela inclut des avancées dans la technologie : A Cello Sings in Daventry se réfère à l’énorme station de retransmission dans le Northamptonshire qui a commencé à émettre en 1927, tandis que The Microphone (The Fleet Is Lit Up) inclut un conseil pour les hommes politiques de la part de George Bernard Shaw et revisite Lit Up du premier album de PSB, comprenant le capitaine de corvette qui était saoul de façon loquace tout en commentant la revue de la flotte du couronnement à Spithead en 1937 (l’explication officielle a impliqué la première utilisation de l’euphémisme “fatigué et émotionnel”). Les articles de foi sur lesquels le nouveau service a été fondé sont également invoqués, avec A Candle Which Will Not Be Put Out articulant les idéaux nobles de la radiodiffusion “l’étendue complète de pensée humaine et d’activité exprimée… au meilleur standard possible”. Il y a un sentiment d’admiration et d’émerveillement quand Ripples in the Ether (Towards The Infinite) regarde un avenir illimité dans une prononciation en anglais standard, accompagné par des ondes radio éthériques et le sifflement et le crépitement d’anciens disques de transcription.

Reith lui-même est au centre de l’attention dans le staccato chatoyant An Unusual Man. “Il n’était là que pendant une période relativement courte, de 1922 à 1938”, explique Willgoose, “mais il est la clé de tout – sa voix et ses idées se retrouvent partout dans la BBC, et il est toujours la force dominante dans son histoire. C’était des jours de grande aventure, ils apprenaient constamment, mais à cause de l’éducation de Reith, il y avait une sorte quasi-religieuse de penchant dedans – il était assez “sermon sur le mont” dans son élocution. Et l’idée qu’un système conçu pour profiter aux actionnaires contrerait les intérêts des médias, et que la radiodiffusion sans le service public est sans but et inutile… on pense, ouais, il pourrait avoir raison”.

Willgoose et JF promettent que la performance inclura des éléments théâtraux : le manque de sources audio originales est tel que certains contenus, comme les paroles de Hilda Matheson, seront narrées par Reeta Chakrabarti, tandis que le chanteur folk Seth Lakeman, né dans le Devon, apparaîtra sur une chanson. Le spécialiste des visuels scéniques de PSB, Mr B, déclare Willgoose d’un ton malicieux, a quelques “bricoles, même si peu de vidéos contemporaines existent. Mais il a mis la main sur une grosse vieille radio, et je voulais commencer avec elle apportée sur scène et branchée et s’allumant en bourdonnant, tandis que le signal commence à passer dans l’éther. Et je voulais finir avec elle qui s’éteint et qui est enlevée d’une scène vide, pour pousser les gens à se poser la question de, eh bien, si la BBC disparaît, comme certains le veulent, qui va prendre sa place ? Parce que ce n’est certainement pas quelque chose qui finance des choses comme les Proms.

D’ailleurs, Willgoose s’irrite quand on lui demande quelques services de la BBC il consomme : “Ce mot consommer est révélateur de combien l’éthique du service public a été corrompu par le commerce”, dit-il. “Je ne consomme rien, je regarde et j’écoute diverses choses et je les apprécie ! C’est Radio 4, BBC Four, Radio 6Music et, de plus en plus, Radio 3. Charlotte Higgins, d’après le livre de 2015 de laquelle, This New Noise. The Extraordinary Birth And Troubled Life Of The BBC, notre œuvre est nommée, disait que la BBC était la plus grande institution culturelle que ce pays n’a jamais connu. Je pense que c’est une force pour le bien, malgré ses faux pas”.

Se souciant du sens pratique, JF anticipe une soirée inoubliable. “Au Royal Albert Hall, tout ce que tu as à faire, c’est te balader en coulisses et regarder toutes les photos des concerts et spectacles qui ont eu lieu là-bas, et ça te donne cette énorme solennité des circonstances. Tu mets tout simplement tellement dans un soir de musique, parce qu’on n’aura peut-être pas la chance de le refaire”.

Tout en marquant une nouvelle frontière pour Public Service Broadcasting, la soirée promet de réaffirmer les premiers principes du groupe – et de la BBC. Nous serons informés. Nous serons éduqués. Et nous serons divertis. Lord Reith serait fier.

Traduction : 1er septembre 2024

Prog | December 2018

Public Service Broadcasting

Venue | Royal Albert Hall, London
Date | 01/11/2018

If Public Service Broadcasting have sometimes suggested an air of fusty academia, all history lessons and libraries, tonight’s the night they shake that off. Reaching a career pinnacle by selling out the Royal Albert Hall, they fill it with colour, physicality and even a dash of showbiz. By the time the brass section in gold sequinned jackets are gyrating downstage with two extras in astronaut suits, exhorting the audience to dance, there’s no denying it: PSB are fun. Intelligent, innovative and atmospheric, but also emotive and exciting. They’re the little band that got big fast, but they’re using the G-force to their advantage.

With tracks that marry krautrock-electronica instrumentals to astutely judged samples capturing the heroism and drame of mountain-climbing, space travel and the fall of the South Wales mining industry, they’re not, on paper, a party band. Yet people have caught on to the adrenaline rush inherent in their sonic stories. ‘A climber climbs with his guts, his brain, his soul and his feet’, declares Everest. The band have realised the brain can’t make the summit alone, so they’ve kept rising. Tonight’s show simmers, then soars.

Diffident fulcrum J Wilgoose Esq plays guitars like Michael Rother and keyboards like OMD, while the rhythm section of drummer Wrigglesworth and bassist (and multi-instrumentalist) JF Abraham bring flesh and blood to the high concepts. Abraham is key to the visual element, his highly mobile enthusiasm a bridge to the crowd. Sure, the films (with relevant topics, from space modules to miners’ wives) and lighting are impressive, but to see musicians playing and hitting stuff gives the mood a heat you wouldn’t get with anonymous tweakers standing behind laptops. There’s a string section and intermittent cameos, ensuring the Chemical Brothers-style electronic backdrops support rather than swallow the humanity. Given that PSB’s chosen themes regard the best aspects of humanity – courage, nobility, resilience – that’s shrewd.

White Star Liner, from the invigorating new EP concerning the Titanic, gets a London debut. Otherwise, the set swoops between favourites, from Every Valley to Sputnik to Spitfire. Tracyanne Campbell sings Progress, Haiku Salut perform They Gave Me A Lamp and Lisa Jên joins a bashful Wilgoose for the incongruous ballad duet You + Me.

Everyone’s up and air-punching for the climax of The Other Side and Go. Clearly a rush for the incredulous South London band, it’s been an inspiring, motivating night, co-opting the daring of the space race protagonists and the steadfast pathos of the neglected Welsh communities. Then, as the ensemble departs, the Beaufort Male Choir bestride the stage to sing Take Me Home, and we learn how many coals it takes to fill the Albert Hall. Not a dry eye in the house. We’ve been taken to the other side.

Chris Roberts

Prog | décembre 2018

Public Service Broadcasting

Lieu | Royal Albert Hall, Londres
Date | 01/11/2018

Si Public Service Broadcasting ont parfois suggéré un air de monde universitaire qui sent le renfermé, tout en cours d’histoire et bibliothèques, ce soir, c’est le soir où ils se défont de tout cela. Atteignant un apogée de carrière en vendant le Royal Albert Hall à guichets fermés, ils le remplissent de couleur, de réalité physique et même d’une pointe de showbiz. Au moment où la section de cuivres aux vestes en sequins dorés tournoie sur scène avec deux figurants vêtus de costumes d’astronautes, encourageant le public à danser, on ne peut nier que PSB sont marrants. Intelligents, innovateurs et atmosphériques, certes, mais également sensibles et formidables. C’est le petit groupe qui est devenu rapidement grand, mais ils utilisent le G à leur avantage.

Avec des morceaux qui marient des instrumentales krautrock-electronica à des samples astucieusement jaugés capturant l’héroïsme et le drame de l’escalade, du voyage dans l’espace et du déclin de l’industrie minière du Sud du Pays de Galles, ils ne sont pas, sur le papier, un groupe de fêtards. Pourtant les gens ont saisi la poussée d’adrénaline inhérente à leurs histoires sonores. “Un grimpeur grimpe avec son ventre, son cerveau, son âme et ses pieds”, déclare Everest. Le groupe s’est rendu compte que le cerveau ne peut atteindre le sommet seul, alors ils ont continué à monter. Le concert de ce soir bouillonne, puis s’envole.

Le point d’appui réservé J. Willgoose, Esq. joue de la guitare comme Michael Rother et du clavier comme OMD, tandis que la section rythmique du batteur Wrigglesworth et du bassiste (et multi-instrumentaliste) JF Abraham apporte de la chair et du sang aux grands concepts. Abraham est la clé de l’élément visuel, son enthousiasme grandement mobile un pont vers le public. Il est certain que les fims (avec des sujets pertinents, de modules spatiaux aux femmes de mineurs) et les lumières sont impressionnants, mais voir des musiciens jouer et frapper des choses donne à l’humeur une chaleur qu’on n’aurait pas avec des anonymes qui tripotent des ordinateurs. Il y a une section à cordes et des caméos intermittents, assurant une toile de fond électronique à la Chemical Brothers sans absorber l’humanité. Étant donné que les thèmes choisis par PSB concernant les meilleurs aspects de l’humanité – le courage, la noblesse, la ténacité – c’est malin.

White Star Liner, extrait du nouvel EP revigorant à propos du Titanic, est joué pour la première fois à Londres. Sinon, le set zappe entre les favoris, de Every Valley à Spitfire en passant par Sputnik. Tracyanne Campbell chante sur Progress, Haiku Salut apparaissent sur They Gave Me A Lamp et Lisa Jên Brown rejoint un timide Willgoose pour le duo ballade incongru You + Me.

Tout le monde lève le bras et bat de l’air pour le grand moment de The Other Side et Go!. Clairement une montée pour l’incrédule groupe du Sud de Londres, cela a été une soirée inspirante et motivante, récupérant l’audace des protagonistes de la course à l’espace et le pathos inébranlable des communautés galloise négligées. Puis, alors que l’ensemble s’en va, le Beaufort Male Choir enfourche la scène pour chanter Take Me Home, et nous apprenons combien de charbon il faut pour remplir l’Albert Hall. Tout le monde a les larmes aux yeux. Ils nous ont emmenés de l’autre côté.

Chris Roberts

Traduction : 26 janvier 2022

Tim’s Twitter Listening Parties et Podcast consacré à JFAbraham

Alors que le groupe devait commencer à enregistrer son quatrième album le mois dernier, ils ont partagé à une des Twitter Listening Parties de Tim Burgess (que ce dernier organise depuis le début du confinement).

Le principe est simple : à l’heure dite, vous lancez l’album là où vous le voulez (CD, vinyle, MP3, streaming, etc.) et vous suivez ou rejoignez la conversation avec le hashtag #TimsTwitterListeningParty.

Le 13 mai dernier, c’était au tour de The Race For Space à laquelle ont participé tout le groupe, nous donnant de plus amples informations sur l’enregistrement du disque.

Vous pouvez retrouver le replay ici. Pour ceux qui ne parlent pas anglais, je vous ferai une traduction.

Celle de Every Valley se déroulera le samedi 20 juin à 19 h heure française.

Également en mai, Seb Philpott (une des trompettes des Brassy Gents) et son amie Verity Simmons ont invité JFabs pour leur podcast Three In A Bar et c’est vraiment très intéressant ! À écouter ici ou sur n’importe quelle plateforme de podcast !

PSB aux Proms !

Quelques mois après avoir rempli le Royal Albert Hall, les voici de retour pour les Proms le 25 juillet prochain !

Le groupe jouera l’intégralité de l’album The Race For Space ainsi que Korolev accompagné par le Multi-Story Orchestra avec un tout nouvel arrangement orchestral réalisé par JF Abraham lui-même.

Les billets seront en vente ce samedi 11 mai. Plus d’informations ici.